Nombre total de visites : 5124695
Aujourd'hui : 513
En ligne actuellement : 2

France : Découverts bancaires bientôt interdits ? Ce que dit vraiment la réforme

2025-11-03 05:58:43 - Alors que les débats se multiplient autour d’une supposée interdiction des découverts bancaires, un point de réglementation européenne cristallise les tensions politiques. Derrière les réactions tranchées, la réalité du texte adopté en septembre 2024 par ordonnance est plus nuancée. 

Le changement ne provient pas directement du gouvernement français, mais d’une directive européenne de 2023, transposée en droit national par une ordonnance adoptée en septembre 2024. Cette directive vise à encadrer plus strictement le crédit à la consommation, face à la hausse des situations de surendettement dans plusieurs pays membres. Elle prévoit notamment de limiter la promotion des crédits à la consommation et d’intégrer les découverts bancaires dans ce cadre juridique, à partir du 20 novembre 2026.
 
les découverts bancaires traités comme des crédits à la consommation
 
Jusqu’à présent, les autorisations de découvert bénéficiaient d’un statut particulier. À partir de novembre 2026, elles seront pleinement considérées comme des crédits à la consommation. Cela implique un encadrement plus rigoureux, notamment une étude de solvabilité renforcée avant tout octroi. Les facilités de caisse de courte durée et les découverts de moins de 200 euros seront aussi soumises à ces nouvelles exigences, ce qui pourrait conduire à un durcissement des conditions d’accès pour certains profils.
 
Contrairement à certaines affirmations relayées par des figures politiques, la réforme ne prévoit pas d’interdire les découverts. Il restera possible de demander une autorisation à sa banque. Ce qui changera, c’est que les accords ne seront plus systématiques ni automatiques. Le banquier devra examiner la situation financière du client, avec un niveau de vérification qui sera plus élevé qu’aujourd’hui, en particulier pour les personnes présentant un risque de fragilité budgétaire.
 
Le gouvernement assure que ces règles auront un impact limité, rapporte RMC. Les autorisations de découvert déjà en place ne seront pas supprimées à l’entrée en vigueur du texte. Les nouvelles demandes, en revanche, seront soumises aux critères de solvabilité définis par la réglementation.
 
Un impact ciblé sur les clients les plus fragiles
 
C’est sur les ménages aux revenus modestes que la réforme pourrait avoir des effets concrets. Les nouvelles règles risquent de compliquer l’obtention d’un petit découvert, y compris de courte durée. Aujourd’hui, ces dispositifs agissent comme des filets de sécurité pour des millions de clients. Leur encadrement plus strict pourrait entraîner un nombre plus important de refus, notamment dans les cas où les revenus sont irréguliers ou trop faibles.
 
Certains spécialistes, comme le juriste Jérôme Lasserre Capdeville, estiment que ces restrictions visent davantage à protéger les consommateurs d’un endettement à répétition qu’à restreindre leurs droits. Les frais liés aux découverts – agios, commissions d’intervention – sont parfois lourds pour les budgets précaires. Encadrer leur usage serait aussi une manière d’encourager des pratiques bancaires plus responsables.
 
Une mesure technique devenue objet de controverse politique
 
LFI, le RN ou encore certains élus LR dénoncent un dispositif qu’ils jugent excluant ou technocratique. La controverse a été accentuée par des prises de parole alarmistes, parlant d’« interdiction pure et simple ». Pourtant, ces mêmes partis avaient voté la directive européenne à l’origine du texte. Le débat révèle surtout la sensibilité politique du sujet, à l’approche de réformes sociales plus larges.
 
En définitive,les découverts ne disparaîtront pas. Mais ils seront encadrés, et plus sélectifs. Une évolution technique, devenue en quelques jours un enjeu symbolique de la relation entre banques, institutions et citoyens.

Article de Adam Mazari - Econostrum.info

: Afrique Monde