2025-03-11 23:13:54 - Le milliardaire est le seul candidat à sa succession. Disposant d’un solide carnet d’adresses parmi les chefs d’Etat africains, il a considérablement amélioré les finances de l’instance continentale durant son premier mandat.
Pour assurer sa réélection à la présidence de la Confédération africaine de football (CAF) mercredi 12 mars, Patrice Motsepe n’a même pas eu à activer les réseaux de Gianni Infantino. S’il est, comme en 2021, le seul candidat en lice, le milliardaire sud-africain a pu cette fois se passer de l’insistance du très politique président de la Fédération internationale de football (FIFA) pour pousser l’Ivoirien Jacques Anouma, le Sénégalais Augustin Senghor et le Mauritanien Ahmed Ould Yahya à renoncer à se présenter.
« Le président de la fédération égyptienne, Hany Abo Rida, a parfois été annoncé comme un possible candidat, mais cela n’a jamais dépassé le stade des intentions. Il n’y a jamais vraiment eu de suspense et il semblait évident que Motsepe serait l’unique candidat », résume Saïd Ali Saïd Athouman, le patron du football comorien. Patrice Motsepe, que sa fortune (estimée à 2,5 milliards d’euros par Forbes) place parmi les dix hommes les plus riches du continent, devrait donc être reconduit par acclamation à la tête de l’instance du football africain jusqu’en 2029.
L’homme d’affaires de 63 ans, président exécutif de la société minière African Rainbow Minerals et propriétaire du Mamelodi Sundowns Football Club, à Pretoria, devrait s’appuyer sur la même équipe dirigeante. En premier lieu, le secrétaire général suisso-congolais Véron Mosengo-Omba, chargé de gérer la CAF au quotidien et contesté en interne, notamment pour un management qualifié de brutal.
« Patrice Motsepe est rarement au Caire [siège de la CAF]. La gestion et les questions administratives ne l’intéressent pas beaucoup. Il délègue beaucoup, parfois trop. C’est aussi un des problèmes de la CAF : parfois, les informations circulent mal, y compris au sein du comité exécutif », relate un président de fédération sous le couvert de l’anonymat. Les absences de M. Motsepe tranchent avec l’omniprésence de ses deux prédécesseurs, le Camerounais Issa Hayatou (1988-2017) et le Malgache Ahmad Ahmad (2017-2020).
Depuis son élection en mars 2021, le président de la CAF, très discret dans les médias, s’est appuyé en revanche sur son carnet d’adresses parmi les chefs d’Etat africains. Beau-frère du président sud-africain, Cyril Ramaphosa, il entretient de bonnes relations avec le roi du Maroc, Mohammed VI, le président rwandais, Paul Kagame, l’Ivoirien Alassane Ouattara et l’Algérien Abdelmadjid Tebboune. « Il a aussi permis à la CAF d’avoir des rentrées financières nouvelles, via la signature de contrats de sponsoring avec de nouveaux partenaires (Unilever, Ecobank, 1xBet) ou le renouvellement de ceux avec Orange et TotalEnergies », reprend Saïd Ali Saïd Athouman.
Problèmes de gouvernance
En 2024, la CAF a doublé les subventions versées à chacune de ses fédérations, celles-ci passant en moyenne de 187 000 à 374 000 euros. Cette somme pourrait, selon des dirigeants, être de nouveau augmentée, et les dotations pour la Coupe d’Afrique des nations (CAN), le Championnat d’Afrique des nations (CHAN), la Ligue des champions et la Coupe de la CAF ont été revues à la hausse en 2024. Le déficit de l’instance, qui était de 37 millions d’euros à l’arrivée de Patrice Motsepe, a été depuis ramené à environ 23,5 millions d’euros.
Lors de son deuxième mandat, le Sud-Africain sera attendu sur plusieurs dossiers, alors que la CAF a été secouée par des problèmes de gouvernance, que ses difficultés financières sont loin d’être réglées et que plusieurs dirigeants de fédérations s’agacent, plus ou moins ouvertement, d’un manque de réactivité dans la programmation de certaines compétitions. Ainsi, le CHAN 2024 a été programmé tardivement à février 2025, avant d’être reporté au mois d’août en raison de l’avancée trop lente des travaux concernant certaines infrastructures, notamment au Kenya.
« Il y a aussi des interrogations concernant la Ligue africaine de football, dont la première édition a eu lieu en 2023. Mais elle ne s’est pas déroulée en 2024 et nous n’avons pas d’informations pour 2025 », confirme Saïd Ali Saïd Athouman. Cette compétition avait été créée en 2022, après que Gianni Infantino en eut soufflé l’idée à Patrice Motsepe. Elle devait concerner 24 équipes, mais seules huit ont pris part à l’édition 2023.
Nombre de joueurs et d’entraîneurs africains militent également pour que la CAF revoie son calendrier. « Il faut un peu plus respecter les joueurs et leur santé. Quand la CAF programme des matchs de Ligue des champions et de Coupe de la CAF le week-end qui suit une période de dix jours où des joueurs étaient en sélection nationale, c’est aberrant ! Le problème, c’est que la CAF est composée de commissions dirigées par des gens qui n’ont jamais joué au football… », juge Nabil Maaloul, ancien sélectionneur de la Tunisie.
Interrogé sur une reforme du calendrier, Yacine Idriss Diallo, le président de la Fédération ivoirienne de football, admet que la CAF doit se saisir rapidement de ce dossier pour « une meilleure harmonisation du calendrier de certaines de ses compétitions ».
Article de Alexis Billebault - Le Monde
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