2024-11-19 21:32:32 - Alors que le Cameroun passait devant le Comité de l’Onu contre la torture, les défenseurs des droits humains dénoncent les pratiques de l’armée et des forces de l’ordre.
Le Cameroun passait devant le Comité des Nations unies contre la torture depuis ce mercredi à Genève. Le cas le plus récent et le plus dramatique est celui du journaliste Martinez Zogo, torturé et assassiné en 2023. Mais il y a aussi les artistes Longue Longue et Willy de Paris, tous deux désormais en exil. Les défenseurs des droits humains ont recensé plus d'une centaine de cas au cours des douze dernières années et ils évoquent une pratique systématique, utilisée par l'armée et la police.
Le dossier semble bien volumineux pour le gouvernement du Cameroun, incriminé dans de nombreuses affaires de tortures. Les cas les plus sinistres sont répertoriés parmi les journalistes, les artistes et les défenseurs des droits humains.
Ainsi, le journaliste Martinez Zogo, enlevé, torturé et assassiné en janvier 2023. A ce drame, qui a traumatisé le Cameroun, s'ajoutent ceux des artistes Longue Longue et Willy de Paris.
De très nombreux cas sont documentés
Le docteur Hilaire Kamga, expert en droits de l'Homme, a lui-même subi la torture. Il affirme avoir documenté plus d'une centaine de cas entre 2012 et 2024.
"Parmi mes 17 arrestations, j' ai subi trois fois la torture, explique-t-il. Les séquelles sont encore là. Il y a 113 cas de tortures qui sont en attente d'être régularisés au Cameroun. Il faut noter que c'est une pratique généralisée sur laquelle, depuis trente ans, nous travaillons. On se rend compte qu'il y a comme une résistance à l'éradication de la torture. Il y a comme une permanence de la torture, aussi bien au niveau des forces régulières, notamment gendarmerie et police, qu'au niveau des forces spécialisées."
La perception des ONG des droits humains est partagée par le Barreau de l'Ordre des avocats du Cameroun. Maître Abah Eric Ebah, le bâtonnier de l'Ordre, explique avoir régulièrement rapporté des cas de torture au président de la Commission nationale des droits de l'Homme du Cameroun.
"La façon dont cela est systématiquement fait par les forces de l'ordre et de sécurité fait qu'on est tenté de croire qu'on leur enseigne ça à l'école, note l'avocat. Parce que les gendarmes, les policiers, à différents niveaux, en zone anglophone, en zone francophone, procèdent de la même manière : taper les gens avec une machette. J'ai vu un autre cas, l'autre jour. Ils étaient en train de verser de l'eau sur le jeune homme, en train de le taper. Ils le tapaient sur l'estomac. Après cela, ils ont arrêté et ont tapé sur la plante des pieds. C'est cruel".
La vidéo de l'artiste Longue Longue
Après le récent cas révélé à travers les médias, celui de l'artiste Longue Longue, qui aurait subi des brutalités et des tortures en 2019, le gouvernement avait promis, par un communiqué du ministre de la Défense, d'ouvrir une enquête pour identifier les coupables.
Ce cas de torture a été rendu public par l'artiste Longue Longue lui-même. Le 23 octobre dernier, il a choisi de diffuser sur les réseaux sociaux un enregistrement vidéo des mauvais traitements qu'il aurait subis. Celui-ci affirme avoir reçu la vidéo cinq ans après, de la part de ses tortionnaires.
La torture est condamnée par le Code pénal camerounais, Elle l'est aussi par les conventions internationales. Le Cameroun a ratifié la Convention des Nations unies contre la torture en 1986.
Le gouvernement en place à Yaoundé est donc à Genève pour répondre des accusations de tortures, conformément à ses engagements antérieurs.
Le Comité contre la torture des Nations unies veille à ce que les Etats rendent des comptes en cas de violations des droits de l'Homme, en enquêtant systématiquement sur les cas signalés de torture, afin d'arrêter et de prévenir ce genre de crime.
Henri Fotso Correspondant au Cameroun pour le programme francophone de la Deutsche Welle
AM
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